Pérou troisième partie - Du vélo au sommet - par Alexi

Nous profitons de notre passage à Ayacucho pour acheter des plaquettes de freins, c'est qu'elles s'usent vite avec toutes ces descentes. En recherchant un magasin de vélos nous tombons sur le président de l'association de cycliste de la ville, il nous amène dans un shop où nous trouvons tout ce dont on a besoin. Après une pause devant l'église, il nous guide à la sortie de la ville et nous rejoint plus tard sur la route. 

La végétation est très changeante, tantôt on a l'impression d'être dans le désert avec des cactus et pas grand-chose d'autres et tantôt dans une zone bien plus humide avec des arbres tropicaux. Nous avons droit à une bonne montée (pour changer). En haut du col, des femmes font à manger et vendent des fruits. On fait le plein de figues de barbarie et de mandarines. Le président de l'association de cycliste nous rejoint et nous accompagne jusqu'à Huanta. Le temps passe vite car nous discutons avec lui. Il nous raconte l'histoire de sa famille, de sa vie, de la région.



Dans les années 90, son père avait une Finca (une ferme) dont les employés ont tous été tués par le « Sendero Luminoso » un groupement politique violent avec une idéologie communiste. Suite aux menaces de mort sur sa famille, ils ont dû fuir à Ayachucho. Le gouvernement a reconnu le tord qui a été fait et a distribué des chèques aux personnes touchées. Lui a reçu un chèque d'un million de dollars qu'il espère encaisser un jour. En arrivant à Huanuco, nous allons boire un jus au marché. Notre ami du jour nous offre un maillot de foot de l'équipe d'Ayacucho avant de repartir faire la route inverse (notre étape de la journée).


Ce soir-là, nous faisons des montagnes de crêpes à la Petzi chez les bomberos. Évidemment, nous partageons notre repas avec nos hôtes en uniforme. En discutant avec eux, nous apprenons que la compagnie est toute jeune. Ils n'ont pas encore de véhicules, mais ils sont au moins six de gardes ce soir-là. Il faut savoir que les pompiers sont 100% volontaires et bénévoles au Pérou. Ce qui signifie qu'ils ne reçoivent aucune rémunération pour leur travail. C'est absolument magnifique de voir que dans un pays encore peu développé des personnes donnent de leur temps dans le seul but d'aider.


Du chaud...

Le lendemain, après une longue descente qui nous ramène à 2000 m, une chaleur intense nous envahit, en prime nous retrouvons ces chers petits insectes suceurs de sang très urticants (c'est pas des moustiques, ça ressemble à des sunflies). Nous profitons de notre arrivée dans un village, peu fréquent sur cette route, pour faire une pause « hydratation » et surtout pour se mettre à l'ombre de ce soleil et de cette chaleur insupportable.


La dame qui tient cette petite « tienda » essaye de nous enseigner quelques mots de Quechua et offre une banane à Anysia avant de reprendre la route. Nous pédalons dans un canyon très aride, avec des paysages qui nous font penser au Colorado (même si on ne sait pas encore comment est le Colorado:) .


En fin de journée, une crevaison nous arrête, en essayant de remettre le pneu, je casse un de nos deux démonte-pneus. Nous sommes en fin d'après-midi mais il fait toujours très chaud, la route est à flanc de colline et bien évidemment personne n'habite dans le coin. On essaye de tout notre possible de remettre ce foutu pneu quand par chance un camion passe sur la route... ni une ni deux nous sautons à bord.


On dort dans une ecole

Nous arrivons finalement de nuit à Anco un grand village. Comme à notre habitude, nous recherchons la compagnie de pompier, malheureusement il n'y en a pas ici. Nous recherchons de l'aide auprès de la police, peu aimable, ils nous envoient dans un hôtel. Peu intéressé par leur proposition, nous finissons par trouver l'école, où des maîtresses nous autorisent à planter la tente dans le préau, en attendant que le gardien revienne de son repas. La seule condition est que nous partions avant 7h, heure à laquelle la directrice arrive.

Un peu étonné on constate qu'une famille est sur le toit d'un des bâtiments (1 seul étage). En fait, ils ramassent un fruit qui tombe directement là et ils ont l'autorisation du gardien pour les ramasser ! Ils nous souhaitent une bonne nuit et s'en vont tranquillement. Anysia discute un moment avec les enseignantes, qui se questionnent quant aux méthodes d'éducation en vigueur en Suisse. Nous ne verrons jamais le gardien et probablement qu'il ne nous a pas vu non plus.


Aventures culinaires

La vallée que nous traversons devient plus verte, la route longe toujours le flanc de coteau et monte et descend gentiment. Nous dormons à nouveau dans une école d'un charmant village.




Une grosse montée nous attend. Nos muscles sont fatigués, nous avons l'impression que notre vélo pèse encore plus lourd, et nous avançons lentement. Pierrick et Maëlle sont loin devant nous, mais bon c'est le deal. On sait qu'avec notre Pino on est plus lent que les autres vélos. Nous prenons le repas de midi ensemble dans un petit restaurant de bord de route. On nous a promis qu'il n'y avait pas de viande dans la soupe. Je suis confiant, mais je n'aurais pas dû car Anysia trouve des bouts de poulets dans son bol. On repart sans payer notre soupe ! Heureusement après ces déconvenues culinaires, durant la fin de la montée, on commence à se faire des blagues sur les bonnes glaces artisanales imaginaires qu'on pourrait manger dans la prochaine ville. Nous avons droit à une jolie descente au milieu de cultures et de petit village jusqu'à Huancayo, où l'on découvre un glacier artisanal. Quel bonheur, c'est pile de quoi on rêvait tous.

En faisant le point sur le calendrier autant nous que Pierrick et Maëlle sommes pressés un peu par le temps car nous devons aller en Colombie rapidement. Nous prenons donc dans la foulée un bus de nuit pour Huanco. Durant notre journée de repos, nous changeons le dérailleur arrière qui s'est abîmé lors d'une petite chute. On repart avec une pièce bas de gamme, mais neuve. 

Le lendemain, nous perdons Maëlle et Pierrick pendant toute la journée. Ces chanceux ont réussi à trouver un véhicule privé qui les a avancés un bon bout. Dans cette région, des attaques à main armée ont lieu régulièrement de nuit. On pense s'arrêter dans un petit hameau quand un camion livreur de poule accepte de nous avancer jusqu'à Maëlle et Pierrick. Imaginez deux végétariens charger leur vélo au milieu de cagettes remplies de poules. L'odeur est nauséabonde car les pauvres animaux sont déjà presque morts entassés dans ces petites cages de plastique. 

On discute durant tout le trajet avec les deux chauffeurs qui nous racontent qu'une fois la nuit tombée ils « sécurisent » leur véhicule : cadenas sur leur chargement, fenêtres fermées et portes verrouillées. Ils ne s'arrêtent sous aucun prétexte. Dans le cas d'une attaque, seules les compétences du chauffeur à manœuvrer entre les rochers mis sur la route permettront aux passagers d'en sortir indemnes. Je ne suis pas super rassuré mais ils nous assurent qu'il ne se passera probablement rien durant ce court trajet !


On arrive à bon port et retrouve immédiatement Pierrick et Maëlle. On nous propose de dormir sur un coin d'herbe dans le stade de foot. Mais celui-ci est rempli de burracho à cause d'un tournoi, ce qui n'en fait pas le lieu idéal. Heureusement, le gardien de l'université d'ingénieurs agricoles nous ouvre les portes d'une salle inoccupée et nous passons une fois de plus une excellente soirée avec nos amis. 

La Cordillera Blanca

Cette fameuse chaîne de montagnes, nommée ainsi car elle était recouverte de nombreux glaciers. Aujourd'hui, comme partout dans le monde, ils ont beaucoup fondu, elle n'en reste pas moins un parc naturel magnifique. 

Nous y commençons une longue montée qui va nous mener au plus haut col que nous avons jamais fait : le glacier du Pastoruri à 4900 et des poussières. Il est difficile d'avoir des informations fiables y'a-t-il des habitations, de l'eau, de la nourriture le long du chemin . Nous faisons donc des provisions au dernier village indiqué sur la carte et continuons notre ascension. Le soir venu, nous passons à côté d'une mine énorme. C'est étrange de voir une telle construction au beau milieu de la nature ! On nous refuse l'accès au village des mineurs où nous pensions dormir, tandis que les carabineros (policiers) acceptent de nous laisser dormir près de leur commissariat! Cela faisait longtemps qu'on avait pas planté la tente dans la nature, ça m'avait manqué!


La nuit, il fait froid, nous sommes déjà à 4000 mètres. Le matin aussi parce que nous partons à l'aube pour avoir suffisamment de temps pour atteindre le col et éventuellement redescendre un bout. Des lacets à n'en plus finir jusqu'à quitter la route principale et arriver sur un chemin de pierres sombres et sans trafic (une moto et une voiture de la journée).



Le paysage est majestueux, nous sommes à plus de 4800 m, entourés de montagnes encore plus hautes. Nous atteignions le point le plus haut de la route et tous fières faisons une séance photo avant de manger notre repas de midi. La route que l'on traverse est spectaculaire avec évidemment des montées et des descentes, nous croisons un ou deux troupeaux de vaches et voyons quelques maisons de paysans au loin. Au plein milieu denulle part, notre dérailleur arrière, flambant neuf se prend dans notre roue. Résultat : lui et 5 maillons de chaîne sont cassés, quelques rayons abîmés. Nous remettons notre ancien dérailleur qui ne fonctionne pas bien et changeons la chaîne (par chance on en avait une avec nous).



Après une bonne pause repas au sommet. 4892 m, nous sommes fins prêts à repartir pour encore 6 km de montée à près de 5000m d'altitude. L'air manque, le souffle est court, les paysages grandioses.



Nous visions d'arriver au départ du sentier d'accès au glacier, une des attractions touristiques de la région, ce qui nous oblige à faire une dernière montée avant d'atteindre finalement notre objectif. Épuisés mais super-heureux nous montons notre tente à 4900 et quelques mètres. Anysia ne se sent pas au top, elle a des nausées avec un léger mal de tête. Probablement dû à l'altitude. On est pourtant bien acclimatés, cela fait depuis la Bolivie qu'on vit entre 3000 et 4000 mètres. Mais ce soir nous dormons encore plus haut. Personnellement je n'ai quasi aucun symptôme, ce qui me permet le matin de monter rapidement voir le glacier, avant de reprendre le vélo.



Durant la descente nous découvrons une nouvelle plante, assez spectaculaire, on dirait un palmier à l'envers. Nous croisons également la route d'américain-péruvien en voiture qui s'arrêtent pour discuter et nous offrent des paquet de petits beurres... ça tombe a pique car on a faim et avec Pierrick on avait envie de se faire un challenge petit beurre ( il a été le plus rapide pour manger ses 7 petits beurre !). Nous retrouvons la circulation, le bruit et la pollution après cette super traversée d'un bout de la cordillère blanche.



À Huaraz nous arrivons presque de nuit et dormons dans le dortoir des bomberos (pompiers). Le lendemain nous déménageons dans un hôtel avec cuisine (et surtout un four). En effet, ça fait plusieurs jours que nous parlons de manger des lasagnes. Nous nous occupons de faire réparer le vélo et nous cuisinons des megas lasagne, avec du fromage du marché. La nuit on n'est pas au top de notre forme du bide ce qui n'est pas cool mais pas trop grave par rapport à Pierrick et Maëlle qui sont partis pour un trek. Le pauvre Pierrick n'a pas pu aller au sommet car trop malade.


Nous repartons avec nos amis et passons dans des villages qui nous permettent d'observer la vie quotidienne, le travail des Péruviens. Le soir, le vent se lève et nous nous arrêtons plus tôt que prévu chez un hôte couchsurfing qui vit avec son adorable maman.




Nous arrivons sur une fameuse route dans un canyon avec plus d'une trentaine de tunnel. Nous finissons la journée dans le village d'El Mirador qui ne compte que deux habitants à l'année. Ils nous ouvrent une des nombreuses maisons du village pour que nous puissions y dormir. La gentille abuela nous offre du Yuka pour agrémenter notre plat. En milieu de soirée un van (avec un allemand, un espagnol et une japonaise) s'arrête dans le village pour y dormir.



Le lendemain nous roulons quasiment jusqu'à la côte, c'est incroyable de se dire qu'il 'y a une semaine nous dormions à 4800m et que nous atteignions aujourd'hui le niveau de la mer. Nous rejoignons la panaméricaine avec le trafic et les camions. Là nous essayons de faire du stop ce qui s'avère plus difficile que ce que l'on pensait. Les bus passant par-là n'ont pas envie de perdre du temps pour charger nos vélos, et les camions sont la plupart du temps déjà sur-chargé.



Un pick-up, fini par nous prendre. Durant le chemin, ils nous expliquent qu'ils se sont arrêtés car nous étions dans une zone avec des voleurs et que c'était pour qu'on garde une bonne image du Pérou. Ayant toujours notre rendez-vous en Colombie, nous essayons le soir même de prendre un bus pour l'équateur, malheureusement tous les bus sont réservés pour les deux prochains jours, fête nationale oblige. Nous achetons donc le premier ticket de bus disponible et allons demander au bomberos pour dormir dans leur caserne. Nous avons droit à un super accueil, digne d'un hôtel. On nous propose deux salles différentes pour nous installer, douche chaude, cuisine et Wi-Fi. On profite de notre journée de repos forcé pour faire une soirée gâteau (principe assez simple, pourquoi se remplir de choses futiles alors que tout le monde attend le dessert ? autant faire que des desserts!).


On prend enfin le bus pendant environ 12h jusqu'à Piura. En attendant le bus suivant pour l'équateur, je me fais attaquer le doigt par un félin énorme du type mini-bébé chat super chou avec des crocs super acérés. Cette morsure a impliqué un rappel de vaccin antirabique en équateur pendant l'attente du bus suivant pour le nord de l'Équateur et un autre en Colombie. Une fois arrivés à la frontière du nord nous faisons les derniers kilomètres avec Pierrick et Maëlle, il leur reste 3 semaines et c'est pourquoi ils prennent un bus pour le nord. Nous arrivons finalement à Pasto, notre point de rendez-vous avec nos meilleurs amis. Nous trouvons la pluie que nous n'avions pas vue depuis longtemps. La suite des aventures dans notre prochain article sur la Colombie.

Notre itinéraire

Photos

Pour encore plus de photos rendez-vous dans la galerie :)

Merci encore à Bomb'heros pour ces magnifiques moments partagés et pour leurs photos incroyables :)


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Commentaires: 1
  • #1

    uFurnarotu (vendredi, 30 septembre 2016 11:11)

    Paysages grandioses. Superbes photos. Jolies anecdotes.
    Et les LASAGNES siciliennes dans les Andes.......
    Votre aventure est toujours croustillante et fait encore rêver.
    Maravilloso viaje. Estoy impaciente de leer sobre Colombia!!